Transcription Balado uOCourant

Saison 4, Épisode 3

Gwen: Bienvenue à uOCourant, un balado informatif, inspirant et divertissant de l’Université d’Ottawa!

Bonjour, je suis Gwen Madiba, animatrice de l’émission et fière détentrice de deux diplômes de la Faculté des sciences sociales. Je suis aussi présidente de la fondation Equal Chance, un organisme sans but lucratif qui valorise les femmes et les communautés noires partout au pays.

Le but d’uOCourant est de vous faire connaître des chercheurs, chercheuses et diplômés à l’avant-garde de leur domaine et d’avoir avec eux des discussions stimulantes sur les sujets du moment.

Aujourd'hui, je reçois Caroline Monnet, diplômée de la Faculté des arts et artiste de descendance anichinabée et française, originaire de l'Outaouais, au Québec. Elle a étudié la sociologie et les communications à l'Université d'Ottawa et à l'Université de Grenade, en Espagne, avant de faire carrière en art visuel et en cinéma. Les œuvres de Caroline ont abondamment été exposées et protégées à l'international, notamment au Palais de Tokyo, à Paris, à la Haus der Kulturen der Welt, à Berlin, au Musée d'art contemporain de Montréal et dans de grands festivals de cinéma, comme le TIFF, Sundance et Cannes. Elle s'est par ailleurs vu décerner le prix Pierre-Ayot en 2020, de même qu'un prix Sobey pour les arts, la plus prestigieuse récompense en art contemporain au pays en 2020.

Caroline s'intéresse vivement à l'expression d'idées complexes sur l'identité autochtone et le biculturalisme, ce qu'elle fait en explorant l'histoire des cultures dans ses projets visuels et médiatiques. Ses œuvres traitent des conséquences du colonialisme. Elle utilise des méthodologies autochtones pour actualiser des systèmes aujourd'hui révolus. Caroline, merci de vous joindre à nous depuis Montréal.

Caroline : Ça fait plaisir. Merci de l'invitation.

Gwen : J'aimerais amorcer notre entretien par une question sur la créativité et l'inspiration que nous posons à toutes les personnes que nous recevons cette saison. Qu'est-ce qui stimule votre créativité? Pourriez-vous nous faire part d'un moment de votre vie où une étincelle créative a eu un effet déterminant?

Caroline : Tout m'inspire. Les conversations que j'ai avec mes amis, avec ma famille, parfois quelque chose que j'entends dans les nouvelles. Même une photo que je vais voir sur Instagram, ça alimente beaucoup ma réflexion. Parfois ça me donne presque des flashs d'idées qui vont grandir dans ma tête, qui vont mijoter un peu dans mon cerveau et qui vont finir par devenir une idée plus concrète. J'aime beaucoup aussi quand je marche ou quand je vais courir. Mes meilleures idées, je pense qu'elles arrivent quand je suis en mouvement, soit quand je suis en train de conduire ou […]. On dirait que l'idée d'avancer permet une certaine réflexion, une certaine créativité. Souvent, ça va être là où je vais aller chercher ma plus grande inspiration.

Je n'ai pas de moment précis où je me rappelle d'avoir eu un déclic déterminant de création, mais j'ai toujours aimé beaucoup les espaces comme les musées ou les cinémas. Je trouve que ce sont des endroits où les gens […]c'est presque sacré, les gens doivent chuchoter, les gens rentrent dans ces endroits-là avec beaucoup de respect. Ça m'a toujours un peu fascinée cette idée-là.

Pour moi, les cinémas, les galeries d'art, les musées sont des lieux qui permettent une représentation du monde. Ce sont des espaces de sociabilité. Il y a des échanges d'idées, du dialogue. Si on peut construire de nouvelles façons de voir le monde […]souvent, c'est vraiment là où je vais chercher toute mon inspiration et me permettre de comprendre un peu ce qui se passe dans le monde, ce dont les gens ont envie de parler.

Gwen : C'est génial, ça. J'aime beaucoup l'idée d'avancer qui motive votre créativité, parce que ça permet de penser un peu au futur avec une pensée beaucoup plus positive. Vous revenez d'Europe, où vous inauguriez récemment l'œuvre Debouttes qui a fait désormais partie de la collection permanente de l'UNESCO à Paris. Vous avez aussi fait cette année une résidence à Göteborg, en Suède, et vous aurez bientôt vos propres expositions en France, en Floride et à New York.

Vous êtes devenue une figure mondiale de l'art. [ricanement] Vous qui vivez à Montréal et qui êtes une artiste multidisciplinaire de souches anichinabée et française. Qu'est-ce que ça vous fait de partager vos œuvres et vos réflexions sur l'identité autochtone et le biculturalisme loin de l'Outaouais où vous avez grandi?

Caroline : C'est sûr que c'est drôle quand on est d'une petite région comme l'Outaouais, qu'on a grandi dans une petite place comme Aylmer, on a du mal à se transposer à l'international. En même temps, ma mère est anichinabée, mais mon père est français. Moi, j'ai quand même grandi entre la France et le Québec, donc j'avais déjà une ouverture sur le monde et une volonté de voyager depuis très jeune et d'aller à la découverte des gens.

Ce que je trouve super à travers l'art, c'est de pouvoir partager nos réalités des Premières Nations au-delà de nos frontières. Je vois vraiment ça comme un privilège de pouvoir m'exprimer sur une scène internationale, que par mon travail, je suis capable d'aller éveiller des consciences, de parler de choses qui me tiennent vraiment à cœur, dont la réalité des Premières Nations. Puis, de mettre mon travail en relation et en dialogue avec ce qui se passe dans le reste du monde, avec d'autres nations, d'autres cultures, d'autres façons de voir, d'autres philosophies. Pour moi, c'est un lieu d'échange.

À la base, mes œuvres ont toujours eu une approche très sociologique. Le regard à l'autre a toujours été très important pour moi, et cette façon de pouvoir accéder à l'international, c'est vraiment un privilège.

Gwen : Justement, en parlant de cette approche sociologique, si je peux me permettre, revenons un instant à votre passage à l'Université d'Ottawa. En quoi vos études en sociologie et en communication vous ont-elles influencée sur le plan artistique et personnel?

Caroline : Finalement, c'est un détour à l'art qui m'aura beaucoup servi. Je ne suis pas d'une famille d'artistes. Je ne savais pas qu'on pouvait en faire un métier, être réalisatrice, cinéaste, artiste en art visuel. Je savais que je voulais aller à la rencontre des gens, et je voulais porter un regard sur le monde. La société m'a toujours intéressée. Comment on grandit? Comment les sociétés se forment? La sociologie m'est apparue comme la meilleure façon d'en apprendre plus sur le monde dans lequel je vis.

Puis, je vois les artistes comme des sociologues. Notre rôle en tant qu'artistes, c'est vraiment d'offrir un regard sur le monde, de proposer un dialogue, de proposer une façon de voir, peut-être de dénoncer aussi certaines choses. En tout cas, moi, j'ai toujours eu cette volonté de changer le monde à ma manière. Au départ, je croyais que c'était par le journalisme et la sociologie, mais je me suis bien rendu compte plus tard que, pour moi en tout cas, c'était plus par la créativité.

L'art, ça me permet de briser des stéréotypes. Surtout là, on parlait plutôt à l'international, ça permet de briser les stéréotypes à l'international, les préconceptions. Tout le monde a l'impression que le Canada est un pays progressiste où tout est rose, où il fait bon vivre. Souvent, on oublie un peu le passé sombre de l'histoire canadienne. C'est ça. L'histoire, la sociologie, l’art, pour moi, c'est un tout qui s'influence l'un et l'autre.

Gwen : Super. Vous parlez, Caroline, de l'art comme un réel espace de dialogue, d'échange, de découverte. Vous avez exprimé la joie de pouvoir partager votre culture, mais aussi les réalités des peuples autochtones. Je me demandais si vous pouvez nous parler un peu plus des joies et des embûches que vous avez vécues en diffusant vos œuvres sur la scène internationale.

Caroline : Il n'y a pas eu tant d’embûches. Après, il y a l'embûche de travailler fort et de continuer à croire en ses rêves et de continuer à croire qu'on a le potentiel pour avancer. Le travail d'artiste, c'est un vrai métier. Souvent, les gens ne se rendent pas compte qu’on travaille tout le temps. On n’arrête jamais, parce que c’est le cerveau qui est constamment stimulé. Il n’y a pas une fermeture; à la fin de la journée de travail, quand on rentre chez soi, on arrête de réfléchir à une œuvre qu'on est en train de créer. On est constamment stimulé. Parfois, l'embûche, c'est d'arriver à balancer un peu tout ce côté professionnel et personnel.

Après, les joies pour moi, c'est de pouvoir parler de mon travail, de pouvoir apprendre à me connaître moi-même à travers le travail, de pouvoir faire un travail qui me passionne, de le communiquer aux autres et de se rendre compte que ce qui vient de moi, ce qui vient de ma personne, de mes opinions et de ma prise de position puisse toucher les gens de façon émotive. Ça, c'est le plus beau compliment.

Gwen : Caroline, vous avez parlé de balancer votre côté professionnel et personnel. Est-ce que ce serait possible de toucher un peu plus là-dessus ? Parce que je pense qu'il y a plusieurs personnes qui n'arrivent pas toujours à balancer les deux. Comment est-ce que vous faites, vous?

Caroline : Au tout début de ma pratique, c'est sûr que mon atelier était dans mon espace de vie, mon salon était transformé en atelier d'artiste. Ç’a pris quelques années avant que je puisse vraiment trouver un espace et de séparer ces deux espaces de travail et de vie pour avoir une coupure. Parce que sinon, je travaillais les week-ends, je travaillais même les jours de mon anniversaire, je travaillais tous les jours. Ça devenait presque une obsession, parce que quand on travaille sur des projets artistiques, on est plongé à 300 % dedans. On s'immerge complètement. Tant que le projet n'est pas abouti, on ne pense qu'à ça.

Je pense que trouver une balance, c'est de savoir mettre ses limites personnelles et physiques aussi et de dire : « Il faut prendre du temps pour soi. » Il y a autre chose aussi que l'art, le travail et tout ça. Je pense que ce n'est pas juste pour l'art, ça doit s'appliquer à tous les autres métiers. Moi, je suis très chanceuse de faire un métier qui me passionne vraiment, où j'ai l'impression que j'apprends tous les jours, que je me surpasse, je me dépasse, je suis toujours en train de grandir, il y a de grands défis. C'est pour ça que je touche à plein de médiums aussi, parce que ça me permet de garder cette curiosité d'apprendre toutes sortes de choses à travers mes collaborations, à travers les sujets que j'explore. Oui, c'est une façon pour moi de découvrir toutes sortes de choses.

Gwen : Vous touchez effectivement à plein de médiums. Vous faites carrière à la fois en arts visuels et en cinéma. Qu’est-ce qui vous stimule dans ces deux médias, créativement parlant? Est-ce qu'ils alimentent différemment votre vision artistique? Qu'est-ce qui vous a motivé à explorer les deux?

Caroline : Ce sont deux médiums différents et deux façons de faire et de travailler qui sont différentes, mais pour moi, ça reste dans le même ordre d'idée d'exploration. Ça s'influence l'un et l'autre. À la base, les intentions sont les mêmes dans mon travail. En général, je parle d'autodétermination. Je porte un regard personnel et contemporain sur des enjeux qui touchent les communautés autochtones ou des enjeux contemporains de notre société.

Je crois vraiment que c'est le message ou le concept que je vais explorer qui va dicter le médium que je choisis. Il y a des choses qui s'expriment beaucoup mieux en sculpture qu'en image, en mouvement par exemple, et vice versa. Parfois, utiliser des mots pour parler de certaines choses, ce n'est pas nécessaire. C'est mieux en peinture ou en sculpture. Je suis très sensible à quel est le meilleur moyen d'exprimer le message que je veux partager.

Gwen : Pour continuer dans la même veine, j'aimerais en savoir un peu plus sur vos créations en arts visuels et vos films. C'est extraordinaire de voir les projets que vous publiez sur votre compte Instagram @Coco.monnet. En 2021, vous y avez partagé Wolves Don't Play by The Rules, une broderie à base de Tyvek dans des teintes de bleu, de blanc et de noir. Au milieu, on peut y lire « Wolves Don't Play by The Rules: Les loups n'obéissent pas aux règles ». Pouvez-vous nous parler de cette œuvre et d'où vous avez puisé cette inspiration?

Caroline : Oui. Cette œuvre, elle s'inscrit dans une longue série de broderies qui sont réalisées sur de la membrane pare-air, du Tyvek. C'est un matériel de construction. Moi, j'utilise énormément les matériaux de construction dans ma pratique en arts visuels. Cette membrane pare-air, vous pouvez sûrement la voir quand vous voyez des maisons résidentielles en construction. Ça permet de recouvrir toute la maison au complet pour empêcher l'air d'entrer dans ces maisons.

Wolves Don't Play by The Rules, à la base, c'est le titre d'une chanson originale de Willie Thrasher, qui est un magnifique auteur, compositeur, interprète inuk. Plus tard, cette chanson-là a été reprise aussi par Elisapie Isaac, une chanteuse inuk aussi. Moi, j'adore cette phrase. Je trouve que ça parle de résilience face aux politiques d'assimilation du gouvernement canadien. La résilience de vouloir rentrer dans la norme d'une société qui voudrait que tout le monde soit pareil. Pour moi, ça parle aussi de survivance, de philosophie autochtone, de cette idée de ne pas se faire apprivoiser et de pouvoir vivre la vie comme on l'entend. C'est pour ça c'était un clin d'œil.

Gwen : J'aimerais aussi parler de votre premier long-métrage, paru l'an dernier, Bootleggers, qui a notamment été récompensé du prix du meilleur film dramatique, à Imaginative, en 2021, du prix cinéaste émergeant de l'année du Festival international du film de Vancouver, en 2021, et du prix du meilleur scénario au Festival de Cannes, en 2017. Vous avez réalisé le film en plus de coécrire le scénario avec Daniel Watchorn. Tourné en langue française et en anishinaabemowin, il raconte l'histoire de Manie, une étudiante à la maîtrise qui revient dans sa réserve natale dans le Nord québécois après plusieurs années. De retour chez les siens, elle s'investit dans le débat en marge d'un référendum sur la vente libre d'alcool dans la réserve. Votre œuvre traite de colonialisme, de communautés, d'identité. Parlez-moi de ce qui vous a inspirée à raconter cette histoire et à en faire un film.

Caroline : Oui. J'ai commencé à écrire ce film à peu près en 2015. Ça fait déjà quand même plusieurs années. À l'époque, on ne parlait pas beaucoup des enjeux autochtones dans les médias. Le cinéma autochtone n'existait quasiment pas, surtout du côté francophone. J'avais envie de raconter notre réalité, mais vue de l'intérieur. C'est toujours raconté par les autres. Je trouvais que c'est toujours une réalité très sombre et pas exactement comme moi je la connais ou celle qu'on me raconte.

À l'époque, quand j'ai commencé à écrire ça, beaucoup de communautés à travers le Canada faisaient des référendums sur cette question de prohibition d'alcool dans leurs communautés. Est-ce que ça fonctionne? Est-ce que ça ne fonctionne pas? Aussi de penser que mon grand-père, sa génération, a élevé six enfants, mais n'avait pas le droit légalement de boire une bière. S'il prenait une bière après sa journée de travail, il était mis en prison. C'est quand même hallucinant de penser que les autochtones sont considérés des citoyens de seconde zone et qu'ils n'ont pas les mêmes droits de citoyens, alors qu'on fait tout à fait partie de ce pays, de cette société.

J'avais envie de brasser un peu tout ça, de mettre au défi les stéréotypes rattachés à l'alcool et aux autochtones, et de parler de ces lois paternalistes qui nous gouvernent encore, la Loi sur les Indiens, d'en parler pour éduquer, pour éveiller les consciences et de montrer à quel point nos communautés sont belles, sont résilientes, elles s'organisent et que les choses se passent beaucoup mieux si on prend nos propres décisions. Le film est à propos de ça.

Gwen : C'est super, Caroline ! Merci beaucoup. Nous avons maintenant une question spéciale pour vous de la part de Jon-Ethan Rankin-Kistabish, un diplômé de l'Université d'Ottawa et membre de la Première Nation Abitibiwinni, qui pratique aujourd'hui au cabinet Murdoch Archambault. Jon-Ethan est un diplômé de la Faculté de droit, Section de droit civil, de l'Université d'Ottawa. Aujourd'hui, il redonne à son alma mater, en tant que membre du Conseil des diplômés et diplômés autochtones. Un conseil qui concourt aux objectifs d'autochtonisation fixés par le plan d'action autochtone de l'Université et qui offre un soutien aux étudiants et étudiantes autochtones d'aujourd'hui et de demain. Jon-Ethan, merci beaucoup de vous joindre à nous.

Caroline : Kwe', Jon-Ethan!

Jon-Ethan : Kwe', Caroline, Kwe', Gwen! Je suis très heureux de me joindre à vous pour le balado uOCourant. Caroline, c'est vraiment un plaisir de vous rencontrer. Tout d'abord, félicitations pour votre œuvre Debouttes qui fait maintenant partie de la collection de l'UNESCO.

Jon-Ethan: Je suis ravi en tant qu'Anichinabé de voir une Anichinabée exprimer nos cultures et nos réalités à travers ses œuvres à l'international. Parce que pour avoir voyagé dans plusieurs pays, je peux affirmer qu'il n'y a, selon moi, pas assez de gens qui connaissent notre existence. Merci pour ton beau travail. J'enchaînerai avec ma question spéciale.

Caroline, est-ce qu'au fil des dernières années, notamment avec les découvertes de Kamloops et l'histoire de Joyce Echaquan, tu as été en mesure d'apercevoir un engouement, voire une accentuation de l'intérêt pour l'art des Premières Nations, ton art? Si tel est le cas, comment est-ce que cela a changé ton art et même la place de celui-ci dans la société?

Caroline : Je dirais que beaucoup de choses ont changé depuis les 10 dernières années. Ça fait à peu près 10 ans que je pratique l'art contemporain et que je fais des films. Mais je vois vraiment une différence depuis la dernière année, malheureusement, parce qu'il y a eu des […] Les autochtones ont pris beaucoup de place dans les médias pour des faits malheureux, mais qui ont permis en tout cas à toute une population de prendre conscience de nos réalités, de s'intéresser. J'ai l'impression qu'on a de plus en plus d'alliés qui s'intéressent et qui ont envie d'être là pour nous.

C'est simplement de savoir qu'il y a 11 Nations au Québec, quelque chose qui, il y a quelques années, il fallait toujours répéter. J'ai l'impression que maintenant, les gens le savent parce qu'ils sont allés faire leurs recherches. Ils sont allés à notre rencontre parce qu'ils se sont dit : « Ça n'a pas d'allure ce qui se passe. » Je veux dire le cas de Joyce Echaquan ou les découvertes de Kamloops, nous, on a grandi avec ça. On est au courant, ce n'est pas nouveau. Ce n'est pas des nouvelles pour nous, mais ça l'a été pour le reste de la population.

Ç’a vraiment créé un engouement pour l’art, pour les artistes. C’est comme si les institutions se sont rendu compte du rôle qu’elles avaient à jouer pour faire une différence. De plus en plus de collaboration avec d’autres artistes. Puis, mon travail qui était déjà quand même assez politique ou avec un engagement assez fort pour parler des enjeux autochtones, a trouvé une place encore plus importante, notamment à l’international, de rentrer dans la collection de l’UNESCO avec une œuvre qui met en scène des femmes autochtones militantes et qui parle de la résistance des femmes.

Oui je pense qu’au lendemain de ces événements-là, l’art autochtone et les artistes autochtones prennent de plus en plus de place et d’ailleurs ne demandent pas leurs places, ils font juste la prendre.

Jon-Ethan : Merci pour cette belle réponse. Je suis d’accord, on doit prendre la place. J’ai espoir que ça va persister dans le temps, cet engouement-là, cet intérêt-là envers notre culture, nos Nations, nos histoires.

Caroline : Je pense que, de plus en plus, on a des plateformes pour s’exprimer aussi. Peut-être que c’est ce que ces derniers événements-là ont permis. C’est qu’on n'est plus juste une petite nouvelle dans les médias. On a une vraie place pour parler de ce qu’il se passe. Je pense que tout d’un coup la société at large, la société en général, s’est sentie concernée par ce qu’il se passe, parce que c’est une histoire commune. Si on veut une vraie réconciliation, il faut qu’il y ait d’abord une compréhension de ce qu’il se passe.

Jon-Ethan : Merci, Caroline.

Caroline : Chi-miigwech.

Jon-Ethan : Chi-miigwech, Caroline.

Gwen : Merci, Caroline, d’avoir répondu à cette question de Jon-Ethan.

Caroline : Ça fait plaisir.

Gwen : Je voudrais terminer par une question que nous posons à toutes les personnes qui nous accordent un entretien cette saison. Qui vous inspire le plus en ce moment et pourquoi? Il peut s’agir d’une personne très proche de vous ou de quelqu'un que vous n’avez pas encore rencontré, mais qui vous inspire.

Caroline : C’est une excellente question. J’ai envie de dire que c’est la prochaine génération qui m’inspire énormément. Les jeunes d'aujourd'hui, leur façon d'utiliser les réseaux sociaux pour s’exprimer, cette volonté d’être uniques et d’être fiers de leur culture, de la propager, ça devient presque contagieux. Je suis très fière des jeunes aujourd'hui. Je trouve qu'ils savent où ils veulent aller, ils savent quoi faire, ils sont fiers d’être anichinabés ou attikameks ou inuits. Ils sont fiers de leur culture. Je trouve ça très beau à voir. Ils utilisent TikTok ou Instagram, ou tous les moyens possibles pour propager leur culture avec fierté. C'est ça, je les applaudis haut et fort.

Gwen : Caroline, vous nous avez beaucoup inspirés aujourd'hui. Je suis sûre qu’il y a plusieurs auditeurs et auditrices qui voudront savoir où vous trouver en ligne. Est-ce que vous pouvez nous dire où vous trouver?

Caroline : C’est sûr que j’ai un site Internet : carolinemonnet.ca. « Monnet » avec deux N, à ne pas confondre avec l’autre artiste Monet. Sinon, Instagram c’est toujours très facile parce que c’est là où je « poste » le plus souvent mes dernières œuvres et mes activités courantes. C’est coco.monnet, voilà!

Gwen : C’est très bien à savoir. On peut aussi vous suivre de plusieurs façons, que ce soit sur Instagram, ou sur votre site Internet. Merci énormément de nous avoir accordé cet entretien, Caroline.

Caroline : C’est moi qui vous remercie. Merci de l’invitation.

Gwen Madiba : uOCourant est produit par l’équipe des Relations avec les diplômés de l’Université d’Ottawa. Rhea Laube est à la réalisation, et Idris Lawal, diplômé de l’Université, signe la trame sonore. Cet épisode a été enregistré avec le soutien de Pop Up Podcasting à Ottawa, en Ontario. Nous rendons hommage au peuple algonquin, gardien traditionnel de cette terre. Nous reconnaissons le lien sacré de longue date l’unissant à ce territoire qui demeure non cédé. Pour obtenir la transcription de cet épisode en anglais et en français, ou pour en savoir plus sur uOCourant, consultez la description du présent épisode.