La modélisation mathématique, un atout pour la conservation des forêts canadiennes

Faculté des sciences
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Les mathématiques, ce n’est pas que la résolution de problèmes arithmétiques. C’est aussi la modélisation de phénomènes en fonction de conditions passées. C’est l’analyse des données et la collaboration avec des domaines qui gagnent à utiliser la simulation numérique.

Ce sont précisément ces aspects des mathématiques que le professeur Frithjof Lutscher et le postdoctorant Sébastien Portalier ont exploités dans le cadre du Partenariat pour une forêt en santé, un partenariat de recherche entre le Service canadien des forêts (une division de Ressources naturelles Canada) et l’Université du Nouveau-Brunswick qui surveille les populations de tordeuses des bourgeons de l’épinette. Cet insecte ravageur, petit, mais non moins nuisible, que l’on retrouve dans les forêts du Canada est le problème auquel s’attaquent les deux scientifiques. En grand nombre, il est hautement destructeur et endommage gravement les arbres hôtes, comme le sapin baumier, ce qui fragilise considérablement la structure des forêts et l’industrie forestière. De telles épidémies, comme celle qui sévit actuellement au Québec et au Nouveau-Brunswick, se produisent tous les 30 ans environ. Au printemps, lorsque la chenille émerge de sa diapause hivernale, elle a besoin de feuillage frais pour se nourrir. Il lui est donc vital que sa sortie de l’hibernation et l’éclosion des bourgeons soient synchronisées. Ces deux phénomènes dépendent des conditions climatiques, qui évoluent à des rythmes différents d’un endroit à l’autre.

Professeur Frithjof Lutscher et le boursier postdoctoral Sébastien Portalier
Professeur Frithjof Lutscher et le boursier postdoctoral Sébastien Portalier

Dans ses travaux, le professeur Lutscher combine des prévisions climatiques et des modèles pour déterminer l’évolution des dates d’éclosion des chenilles et des bourgeons en fonction des régimes de température, et ainsi prévoir les effets des changements climatiques sur la synchronie de ces phénomènes dans différentes parties du pays. L’objectif : créer une carte des risques qui prédit, pour une année donnée, les secteurs des forêts du Canada qui sont les plus susceptibles de subir les attaques de cet insecte défoliateur. À l’avenir, les chercheurs souhaitent intégrer le modèle de synchronie sur un an à un grand modèle de dynamique des populations qui prend en compte plusieurs années, afin de pouvoir prédire les scénarios d’épidémie d’insectes et d’utiliser des simulations informatiques pour trouver les stratégies de gestion optimales qui réduisent au minimum le nombre d’arbres morts.

Les modèles mathématiques du professeur Lutscher peuvent servir à orienter les mesures de lutte contre l’insecte, comme la pulvérisation d’insecticides dans les zones particulièrement à risque, et ainsi favoriser la rentabilité et l’efficacité des programmes d’atténuation des risques. Le partenariat est avantageux pour son programme de recherche de deux façons : i) il lui donne accès à des données sur le climat et sur l’apparition, la survie et la mortalité des insectes et des arbres, et ii) il l’aide à établir un pont entre deux domaines de recherche auparavant distincts, soit la phénologie et la dynamique des populations. Le premier porte sur le développement d’organismes durant leur cycle de vie (dans le cas présent, en fonction des conditions climatiques), tandis que le second vise la croissance et le déclin de populations entières sur plusieurs générations. Le système tordeuse des bourgeons de l’épinette-sapin baumier offre une possibilité intéressante de conjuguer ces deux domaines pour obtenir de nouveaux renseignements qui contribueront à une gestion durable des forêts du Canada.

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